Œil pour œil, dent pour dent … Qui ne connaît pas cet adage, qui ne l’a pas cité au moins une fois dans sa vie, même pour rire … ? 

L’islam est une religion juste, qui donne son droit à chaque être. De ce fait, lorsqu’il est porté atteinte aux droits d’une personne (physiquement – en étant blessé par exemple, mais aussi moralement par l’atteinte à la réputation, la médisance etc.), il lui est possible de réclamer réparation (terme que nous préférerons à celui de « vengeance ») : ceci est un droit reconnu par le Shari’ah.

Car ce que l’on appelle la loi du talion (rendre la pareille lorsqu’il est porté atteinte aux droits de la personne) est venue justement encadrer les envies de vengeance, afin d’éviter des dérives telles que les vendettas qui se déroulent sur des décennies, voire des siècles entre grandes familles (oui, je sais, ça fait très Roméo et Juliette tout ça). De même, il est important de noter que l’application du talion doit être juste et proportionnée au préjudice subi[1] (c’est beau dit comme ça hein… ?).

Tout ceci est merveilleusement bien résumé par les versets suivants :

« Et qui, atteints par l’injustice, ripostent (se vengent). La sanction d’une mauvaise chose est une chose [une peine] identique. Mais quiconque pardonne et réforme, sa récompense incombe à Allah. Il n’aime point les injustes! Quant à ceux qui se ripostent après avoir été lésés, ceux-là pas de voie (recours légal) contre eux. Il n’y a de voie [de recours] que contre ceux qui lèsent les gens et commettent des abus (en agissant) hors du droit ; ceux-là auront un châtiment douloureux. Et celui qui endure et pardonne, cela en vérité, fait partie des bonnes dispositions et de la résolution dans les affaires. » (Sourate Achoura, versets 39 à 43)

« Et si vous punissez, infligez à l’agresseur une punition égale au tort qu’il vous a fait. Et si vous endurez, cela est certes meilleur pour ceux qui endurent. » (Sourate an-Nahl, verset 126)

Mais remarquez-vous qu’à chaque fois qu’il est question de ce droit à réparation égale, Allah ajoute qu’il est meilleur, pour nous, de pardonner ?

« Celui qui pardonne cela, ce sera une cause de pardon pour ses (propres) péchés. » (Sourate al-Ma’idah, verset 45)

De plus notre Prophète (sallallahu ‘alayhi wa salam) a enjoint au pardon. Ainsi, il est rapporté que « chaque fois qu’un cas où le talion était applicable était présenté au Prophète (sallallahu ‘alayhi wa salam), il recommandait (aux proches de choisir) le pardon. » (Rapporté par Abu Dawud)

Et comme j’aime bien raconter ma vie… il y a peu, une sœur partageait sur Facebook un lien menant vers un téléfilm américain. Curieuse, j’ai cliqué, et me suis laissée embarquée par l’histoire : celle d’une communauté Amish, qui a vécu un terrible drame : un homme est entré dans leur école et tué plusieurs enfants. Les parents des victimes, malgré leur immense tristesse, pardonnèrent au tueur (qui s’était suicidé). Alors quand on est là, devant sa télé, on regarde, un brin incrédule, les belles phrases énoncées, les nobles comportements exposés, et l’on se dit « mais bien sûr, il a tué ta fille et toi tu pardonnes ». Puis ils expliquent que garder la colère est trop lourd, trop oppressant, et que finalement, mieux vaut laisser Dieu se charger de rendre Sa Justice, ici-bas, ou dans l’au-delà. Et là, malgré le mélo américain, la petite propagande pro-Amish, et tous ces trucs agaçants typiques des téléfilms outre-Atlantique, on se dit : « Ah ouais, quand même … Et moi, serais-je capable de faire pareil ? D’abandonner ma colère, si oppressante mais qui me semblerait si réconfortante dans un moment aussi difficile ? Mes pensées se tourneraient-elles de façon si abandonnées vers Lui … ?  » 

Pardonner, sur le papier, est facile. Mais comme tout combat, une fois qu’il se concrétise dans nos vies, il est bien plus ardu à mettre en œuvre. Allah, dans Sa grande Bienveillance le sait, et nous rappelle, dans de nombreux versets, combien est meilleur le pardon. Et il y a dans Son Envoyé (sur lui la grâce et la paix) un exemple parfait de mansuétude et de pardon. Repensez à l’épisode de Ta’if : rejeté, chassé à coup de pierres, ses seules paroles furent « Seigneur, pardonne mon peuple car ils ne savent pas« , alors qu’il aurait pu appeler Son châtiment sur la ville.

Alors nous en sommes là : cette réparation, lorsque l’on a été lésé, est un droit octroyé par la Shari’ah, et ne constitue donc en aucun cas une faiblesse. Quant au pardon, il est bien plus grand et constitue, lui, une vraie force.


[1] Bien entendu, et à titre d’exemple, si une personne en calomnie une autre, la réparation ne pourra pas être une calomnie en retour, celle-ci étant formellement interdite en islam.