Les rapports mère-fille sont souvent complexes. Mais lorsqu’on vit sans maman et que celle-ci n’a pas assumé son rôle de parent, comment se construire ? Notre magazine « Infiniment Maman » contient un bel article abordant ce sujet, une de nos soeurs nous apporte un témoignage poignant mais plein d’espoir sur son épreuve. Qu’Allah facilite ceux et celles qui vivent le manque de maman.

seule

بيسم الله ا ار رحمن ا ار رحيم

السلام عليكم ورحمة الله وبركاته

Je vous écris à propos de l’appel à témoins concernant les lectrices qui auraient grandi sans mère.
Sobhan Allah, quand j’ai vu ça, je me suis dit que ce serait un bon moyen pour moi d’en parler, même si ça n’est un secret pour personne dans mon entourage. 
Mon histoire est vraiment atypique, j’espère ne pas être trop longue 🙂

Abandonnée…

Je suis née de parents non mariés, et j’ai grandi dans la famille de mon père, sans aucun contact avec ma mère ou sa famille.
Mes parents se sont séparés alors que je n’étais encore qu’un bébé, et mon père a obtenu ma garde exclusive après peu d’années. Je n’ai jamais eu aucun souvenir de ma maman. En revanche, mon père s’étant remis en ménage de suite, j’ai grandi avec une femme que j’appelais maman, et sa fille, de dix ans mon aînée, qui était ma grande soeur. C’est à l’âge de six ans que clairement on m’a dit la « vérité »: 《M. n’est pas ta maman; ta maman t’a abandonnée.》
Sur le moment je n’ai pas eu de réaction. C’est après, lorsque M. et mon père se sont séparés, que j’ai commencé à y penser. J’ai vécu un moment chez mes grands parents et alors là cette pensée ne me quittait plus : ma mère, ma maman, m’avait abandonnée, laissée tomber pour avoir d’autres enfants et refaire sa vie… 

La fin de l’innocence

Lorsque je suis retournée vivre auprès de mon père, c’était juste lui et moi et c’est devenu très difficile. À partir de cette période, finie l’innocence ; je suis devenue une vraie tête brûlée mais bien malgré moi car j’étais tellement sensible et douce à la base que me rebeller contre l’autorité c’était aussi et surtout me rebeller contre moi-même. J’étais en conflit permanent contre tout et tout le monde et j’ai vécu en crise pendant des années.

J’ai haï ma mère

Durant toute cette période, j’ai haï ma mère. Je l’ai rendue coupable de toute ma peine et de celle de mon père. Je ne voulais pas entendre parler d’elle. Évidemment, accepter de grandir et devenir une femme n’a pas été facile alors je faisais tout comme mes copines, même si j’avais aussi du mal à m’entendre avec les filles. Quand j’ai eu 17 ans, mon père m’a confié avoir rencontré ma mère en ville et il m’a laissé ses coordonnées. Il voulait que je prenne contact, pensant que c’était ce dont j’avais besoin. J’ai déchiré le papier et n’y ai plus pensé. 

Conversion et destruction

À 20 ans, j’ai rencontré l’islam et des soeurs merveilleuses Allahûma barak. J’ai embrassé cette religion et en l’apprenant, j’ai appris l’importance qu’Allah azawajal accorde aux liens familiaux. Alors j’ai décidé qu’il était temps, et même si je n’en avais pas envie, j’ai franchi le pas, j’ai repris contact avec ma maman.
Ça ne s’est pas passé comme je l’espérais et je me suis sentie tellement rejetée, encore, que j’étais pleine d’amertume. J’ai abandonné tout ce que j’avais construit de bien durant une année : prière, hijab, études, bonnes fréquentations. Et j’ai repris mes mauvaises habitudes.

Allah ne m’a pas abandonnée

Mais Allah dans son infinie miséricorde ne m’a pas abandonnée et Il sobhanu m’a laissé une seconde chance. Une année après, j’ai repris la prière, la fréquentation des gens pieux, le hijab et surtout je me suis mariée et je suis tombée enceinte de suite. Là bien sûr, c’était beaucoup d’émotion. J’ai imploré Allah de me donner un fils car j’avais trop peur de ne pas gérer une relation mère-fille, n’en n’ayant pas connu.
Allah dans son infinie sagesse m’a accordé une petite princesse. Quand j’ai appris le sexe de mon enfant j’étais emplie de joie. J’avais peur mais j’étais confiante car je sais qu’Allah répond à nos invocations. Donc il y avait forcément un bien, Sa Sagesse est au dessus de tout. Et à nouveau j’ai repensé aux liens familiaux. Au fond de moi je savais quelle était ma responsabilité. Il m’a fallu 6 mois après l’accouchement mais je l’ai fait, al hamduliLlah : j’ai écrit une lettre à ma mère, je lui ai annoncé la naissance de sa petite fille. Elle m’a immédiatement appelée et nous avons pu mettre certaines choses à plat.
Aujourd’hui nous nous voyons. Certes nous ne possédons pas une grande complicité et n’avons pas vraiment le même caractère mais al hamduliLlah. Ça n’efface rien et j’ai toujours autant de mal avec certaines activités « de fille » comme le maquillage, les soirées entre femmes etc. mais avec du temps et ma petite auprès de moi je me répare. Ma mère n’est pas la personne que j’appelle pour me confier ou pour obtenir des conseils et il est vrai que j’appelle plus souvent mon père mais hamdulillah je sais qu’elle est là, présente dans ma vie et dans la vie de ma fille, je sais qu’à notre manière nous nous aimons. C’est tout ce qui m’importe, ça et avoir enfin fait la paix avec mon passé.

Clairement je sais grâce à mon histoire que la sagesse et la miséricorde d’Allah sont infinies et nous dépassent.
Rien n’arrive par hasard, c’est à nous de tirer des enseignements de nos épreuves et de toujours s’efforcer d’en voir le côté positif car il existe toujours même si sur le moment il ne saute pas aux yeux.

Voilà l’essentiel (je pense) de mon histoire,
Puisse Allah faire de nous toutes des femmes, des filles, des soeurs, des épouses et des mères pieuses, justes et vertueuses.
Amin.

Wassalam

Ummpoupounette