Une de nos soeurs a désiré nous faire part de l’épreuve qu’elle a vécue lors de la perte de sa bien-aimée grand-mère. Qu’Allah lui accorde le Paradis et qu’IL apaise notre soeur et la récompense pour sa patience et son endurance.

grand-mere

Salemwa3lekoum à toutes,

J’ai grandi au sein d’une famille musulmane hamdoulileh, avec mes parents et ma grand-mère. Mes parents travaillant beaucoup, c’est notre grand-mère qui nous a élevé mais beaucoup plus moi, étant une fille je restais toujours avec elle. Elle m’a beaucoup appris, la langue arabe, l’islam, son histoire à elle, le rôle d’une femme, etc. J’ai tout mais vraiment tout partagé avec elle. Notre relation était fusionnelle, on dormait dans le même lit (jusqu’à mes 22 ans ;), elle prenait sa douche uniquement avec moi et refusait même avec sa propre fille (ma mère). Cette relation c’était la plus belle chose que j’avais, c’était mon réconfort, mon épaule, mes rires, mes larmes, mon apaisement. En fait elle était pour moi MON JOURNAL INTIME. Quand rien n’allait dans ma vie elle le sentait et on en parlait pendant des heures, elle me racontait son désarroi, sa peine de voir certaines choses familiales la blesser. Elle me connaissait par cœur et moi de même.

Elle allait régulièrement à l’hôpital parce que n’étant pas toute jeune elle avait quelques soucis de santé. Mais hamdoulileh à chaque fois elle ressortait mieux,  je n’ai jamais songé un jour à son retour à Allah.

Et un jour la voyant très épuisée, elle ne mangeait plus depuis deux jours, nous avons appelé son médecin qui l’a vite transféré dans son service. C’était un mercredi je m’en rappelle. Elle part en ambulance et me dis « ma fille tu viens après », je la rassure, prépare ses affaires et la rejoint à l’hôpital. Les jours passent et elle ne s’alimente toujours pas sauf par perfusion. Je croise son médecin samedi et lui demande des nouvelles, il me dit « il faut s’y attendre » et la choquée de ses paroles je pars et pleure seule. Je ne veux pas y croire et me force à la voir mieux. Mais son état empire, elle me parle peu et dort beaucoup. Lundi le médecin me dit «vous savez elle partira en dormant » et la je fonds en larmes et lui dit « Docteur avec tout le respect que je vous dois vous n’êtes pas Dieu, Seul Dieu décide d’ôter la vie ».

Mardi midi, je suis la plus heureuse, mon visage s’illumine, mon oxygène revient, la fatigue des nuits courtes disparait, ma ommi est réveillée, elle parle et réclame à manger. Hamdoulileh. Toute heureuse j’appelle ma mère et lui dit tout mais elle me coupe mon souffle avec ces mots « Benti ne montre pas ta joie, elle va s’en aller, mais Allah lui donne un peu de force afin de nous parler  une dernière fois », je lui réponds «maman tu dis n’importe quoi de toute façon, Allah y tower lia 3mar (que Allah lui prolonge la vie) » et je raccroche exaspérée. Je retourne prés d’elle, je cours dans tout le service elle voulait du pain ;). Je m’absente l’après midi , ayant une fracture je dois voir mon médecin du travail à plusieurs kilomètres de là.

Je rentre le soir, arrive dans sa chambre elle dort. J’essaie de la réveiller mais rien n’y fait. Elle est plongée dans un profond sommeil mais me sert ma main. Ma mère la veillait toute la nuit, elle me dit « Benti c’est toi qui la lavais depuis des années, donc on va la rendre propre, au moins si elle doit partir elle sera propre en plus du lavage mortuaire ». Je tombe des nues, ma gorge se noue et mes larmes coulent, je la lave au gant de toilette, lui coupe les ongles, et lui tresse une natte comme elle les aime. Je finis par l’habiller avec du linge propre et la parfume d’eau de Cologne (elle aimait trop).

Le lendemain tout le monde est là auprès d’elle, mais elle dort toujours.

Je sens mal la suite, j’ai un pressentiment qui me serre le cœur, je décide de la veiller avec son autre fille. Je mets le Saint coran toute la nuit, je lui prends son doigt et lui récite « Achadou an la ilaha a ina allah wa achadou ana sidna rasoullAllah», je lui imbibe les lèvres de fleur d’oranger, et je lui passe un gant mouillé parce qu’elle avait beaucoup de fièvre. Je me fais une place près d’elle, je ne voulais pas la quitter. Ma tante se réveille dans la nuit vers 4h du matin et me dit « t’es encore là, rentre ma nièce, tu as encore de la route à faire, je suis auprès d’elle ne t’inquiète pas, et demain on aura besoin de toi ». Je m’exécute et rentre à contrecœur, le cœur noué je ne voulais pas l’abandonner.

Il est 5h du matin quand je rentre, j’invoque le Tout Puissant, et je m’endors épuisée. Mon téléphone sonne à 9h ce jeudi 18 mars 2010, ma mère pleurait, on m’annonce son décès. Je les supplie de la laisser dans son lit (je voulais la toucher encore chaude) et leur dis qu’on arrive tout de suite. Je réveille le reste de ma famille et je vais en vitesse à l’hôpital, mes larmes ne s’arrêtaient plus de couler. En rentrant, je la vois au même endroit elle ne respirait plus, je pleure sur son corps et crie mon désarroi : Ya Albé khelini ommi (Ô Allah laisse-moi ma mère) tout le monde me calme mais je leur demande de me laisser tranquille. Et ce jour là, la prunelle de mes yeux s’en est allée, j’ai perdu tous mes repères, mon pilier, mon oxygène, celui qui donnait un sens à ma vie, je l’aimais plus que tout au monde ma ommi. Certains vont se dire mais c’est trop la relation qu’elle a eu, moi je leur dirais que ce n’est pas trop justement ce n’est pas assez…

Je vous passe les détails du déroulement de l’enterrement, cela fut très délicat pour moi, le cercueil, le linceul, la salat « janaza » (prière mortuaire), la foule de monde, etc. Après ça plus rien n’avait de sens pour moi, j’ai arrêté mon taf (j’étais fonctionnaire), j’ai vécu un an au Maroc, là où je me sentais près d’elle. HAMDOULILEH, grâce à ma mère, à force de patience avec moi, j’ai remonté la pente difficilement, je pleure encore sans cesse, mais j’y suis arrivée. Désormais je fais ce que ma oummi m’a demandé sur son lit d’hôpital « Prends soin de ta mère, ne l’abandonne jamais, elle a beaucoup travaillé pour tout vous donner ».

Je n‘ai qu’un but c’est tout faire sur Terre pour la retrouver au Paradis inch’Allah. Je n’ai qu’un seul regret c’est qu’elle ne sera pas là le jour de mon mariage (rien que d’y penser j’en pleure horriblement.) Je l’aime ma Oummi, Allah y rahma ou y rahm je3 lmouslimine, que Allah lui fasse miséricorde, et qu’Il l’accueille dans son humble demeure. INA LILLAH WA INA LILLAH RAJIROUN « A Allah nous appartenons et à Allah nous retournerons ».