Nous continuons notre saga autour de la vulnérabilité et du handicap proposé par Hanane Karimi, en vous parlant aujourd’hui de l’autonomie et de la dépendance. L’autonomie dans son acception générale exprime l’indépendance et la capacité individuelle de se débrouiller seul.

Pourtant personne ne peut être indépendant des autres, nous sommes tous des êtres sociaux, destinés à vivre ensemble, nous sommes de fait dépendants des autres. Alors dans une situation de handicap, nous pouvons faire le choix de ne voir que la perte d’une partie de l’autonomie : l’autonomie physique. L’autonomie n’est pas que physique. Comme nous l’avons vu plus haut, c’est l’incapacité d’exprimer son autonomie qui est perturbée et qui nous questionne sur la meilleure manière d’y remédier.

handicap autonomie

D’une part, les personnes en situation de handicap se retrouvent dépendantes dans tout ou partie des actes de la vie courante, mais cela n’empêche pas toujours la capacité à décider de sa vie. Des exemples de cas extrêmement problématiques de polyhandicap nous obligent à repenser l’autonomie de l’individu en situation de handicap. En effet, penser l’autonomie, c’est penser à la place de l’autre tout en respectant les quatre principes de la bioéthique dont la bienfaisance, la non-malfaisance et la justice qui sont par ailleurs des principes de l’éthique islamique.

Accompagner l’autre c’est prendre le temps d’une véritable écoute avant de « faire pour l’autre ». C’est laisser le temps à la personne d’exprimer sa réelle demande avant de « penser pour l’autre »[1].  C’est donc ici que se pose la question du consentement.

Le consentement :

« Ce qu’on appelle le processus de consentement libre et informé est, avant tout, le droit reconnu et donné de pouvoir dire non. Le consentement vient après : c’est dire oui après avoir pu dire non. »[2] .

Peut-on parler de consentement pour des personnes en situation de handicap ? Ce consentement n’est-il pas partagé par les différents décideurs responsables du bien-être de la personne en situation de handicap ? Face à des personnes inaptes à s’exprimer verbalement, comment peut-on recueillir le consentement ? Suzanne Rameix dans son livre Fondements philosophiques de l’éthique médicale nous propose la question suivante : «  Est-il légitime de se substituer au patient pour faire « son bien » ? D’autre part, jusqu’où est-il légitime – pour soulager certains troubles – de porter atteinte à ces capacités si elles sont les conditions de l’autonomie et si l’autonomie définit la personne ? »

Une avancée cependant est à noter au niveau politique, la loi se positionne de plus en plus vers une autonomisation des individus. Suzanne Rameix précise que « la tendance actuelle des législations est de faire prévaloir la recherche de l’exercice – même limité – de l’autonomie des patients. » Cependant, dans quelles mesures ces lois sont-elles effectives, peuvent-elles être appliquées ? Comment recueillir les directives anticipées auprès de patients atteints de maladies neurologiques. Nous constatons que  « Nous ne manquons pourtant pas de réponses généreuses, sous la forme de l’affirmation d’un droit et de son inscription dans la loi : loi sur l’accès aux soins palliatifs ; loi sur la fin de vie, loi sur l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes en situation de handicap ; loi sur le droit au logement… mais sans se préoccuper de l’essentiel : l’inscription de ce droit dans la réalité, ce qu’Amartya Sen appelle l’accès au droit ; sans lequel il n’y a pas de véritable droit. »[3].

Et l’éthique permet véritablement de repenser la place de l’autre comme une question centrale. Pourquoi légiférer sur des aspects éloignés des préoccupations quotidiennes des personnes en situation de handicap, de leurs soignants et de leurs familles quant il faut d’abord penser la place de l’autre dans nos vies.

Retrouvez les autres articles de la saga :

[1] Merci à Béatrice M. pour cette distinction.

[2] Dir. E.Hirsch,op.cit., p.15

[3] Dir. E.Hirsch,op.cit., p.23