Pour ce dernier volet de notre saga sur le commerce, ouvrons une petite réflexion sur l’avenir et les opportunités des entrepreneurs musulmans.

A l’heure de la reconstruction et du boom industriel, la France est allée chercher une main-d’œuvre abondante issue principalement du Maghreb, mais aussi d’Afrique subsaharienne et de Turquie. Pour pallier le manque de produits de leurs pays, les premiers commerçants musulmans sont apparus, faisant fleurir les fameuses « épiceries arabes » ou encore les boucheries halal. De nos jours la deuxième, voire troisième, génération née sur le sol français est en âge de travailler et de plus en plus de convertis viennent grossir les rangs de la oumma : quelles perspectives pour nous ? 

La communauté musulmane a tout d’abord un atout de taille. Dans un pays vieillissant elle est caractérisée par une population jeune : « 35% d’entre eux ont moins de 25 ans, contre 16% pour l’ensemble de la population française. En ce qui concerne l’insertion sociale, on constate que cette population jeune est plus fragilisée par rapport à l’ensemble des Français. Ils sont 29,5% à être inactifs, c’est-à-dire des étudiants et des jeunes sans emploi, alors que le taux est de 15,5% pour l’ensemble de la population. »[1]

Aux vues des discriminations à l’embauche et des difficultés à pratiquer sa religion, il est logique d’être tenté par l’aventure de l’entreprenariat : être « son propre patron », gérer son temps, choisir un secteur qui plait, gagner de l’argent licite et vivre en même temps sa foi de façon décomplexée sont autant d’arguments qui plaident en faveur de l’entreprenariat. Par ailleurs, outre son intérêt personnel, pensons de façon plus sociale et solidaire : c’est un moyen de développer l’emploi dans la oumma et de démontrer que travailler et pratiquer sont parfaitement compatibles (est-on plus apte à se concentrer et à œuvrer positivement après une « pause cigarette » ou une « pause salat » ?). Par ailleurs, plus les musulmans auront une visibilité et un poids économique et commercial, plus ils pourront faire entendre leurs revendications…

Dans la perspective de créer un lien et un espace d’échange entre les entrepreneurs musulmans, la Synergie des Professionnels Musulmans de France (SPMF http://www.spmf.info) est une entité novatrice et fédératrice. Ils ont accepté de nous apporter un éclairage sur la question de l’entreprenariat musulman.

« La SPMF est une association à but non lucratif qui regroupe des professionnels de tous les secteurs (dirigeants, entrepreneurs, libéraux et auto entrepreneurs).  Nous avons pour objectif de : gérer et résoudre les problématiques économiques touchant les professionnels musulmans ; de favoriser l’entreprenariat musulman ; de lutter contre l’islamophobie dans le monde de l’entreprise ; de devenir une force économique et sociale ; et de développer un réseau de professionnels.  

Les enjeux pour les entrepreneurs musulmans sont ainsi le développement de potentialités effectives de la communauté musulmane ; la participation au développement social de la communauté en permettant notamment à tous les laissés-pour-compte de trouver un emploi ; le soutien des porteurs de projet en mettant à leur disposition l’expérience acquise en tant qu’entrepreneurs ; et la communication sur l’importance pour un entrepreneur musulman d’être initié aux règles islamiques en matière de commerce. L’auto-entreprenariat attire de plus en plus de jeunes, dont des jeunes musulmans. Ce qui explique cette montée accrue de l’entreprenariat musulman et l’envie que les musulmans et musulmanes ont de devenir leur propre patron. Ceci leur permettant d’alliant professionnel et spiritualité. 

Depuis longtemps l’entrepreneuriat musulman rimait avec épicerie ou fast-food. Cette époque est maintenant bien loin. Même si le type d’entreprises majoritairement représentées à l’heure d’aujourd’hui est dans le secteur de la restauration rapide, on constate que les jeunes entrepreneurs musulmans sont devenus force d’innovation. Les domaines tels que l’informatique, la vente en ligne, l’humanitaire ou encore l’agroalimentaire les attirent de plus en plus. Les générations ont changées, la jeunesse musulmane de France est de plus en plus diplômée et ambitieuse. Celle-ci souhaite changer les habitudes en créant des entreprises en rapport avec leurs cursus scolaires.

Par ailleurs de plus en plus de femmes musulmanes se lancent dans l’entrepreneuriat. Nous avons découvert de réels potentiels, un dynamisme et une motivation qui nous ont donné l’envie de concrétiser enfin un projet qui nous tenait à cœur, la SPMF « au féminin » qui a été un franc succès lors de sa première édition de juin. La prochaine rencontre est prévue pour le mois de novembre incha’Allah. »

L’entreprenariat musulman : des idées, de l’envie, de l’ambition, une bonne dose de volonté, du travail, de l’éthique et de l’entraide. Une recette de plus en plus convoitée et qui fait de plus en plus d’adeptes. Et vous ? Qui parmi vous s’est lancé ou a l’objectif de « sauter le pas » ? Quels sont les freins ou les difficultés que vous avez rencontré ou à l’inverse quels moyens vous avez trouvé pour vous aider à réussir ?