Nous étions invités, mon mari et moi, chez des amis. A la table, 3 autres couples dont nos hôtes. De bavardages en bavardages, j’étais dans l’obligation de me rendre à une certaine évidence :  les couples heureux ne sont pas pléthore. Chacun rêve de vivre le grand amour et peu semblent y parvenir.

couple

A l’époque de nos parents, le couple en tant que modèle social ne se discutait pas. Aujourd’hui, le monde a changé, on ne fait plus confiance aux institutions. Comment pourrait-on alors encore faire confiance au couple ?  Dans une culture qui valorise l’épanouissement individuel, le statut de célibataire paraîtrait presque plus enviable.  Aux solos, la liberté, la possibilité de s’accomplir vraiment, sans être entravés par le carcan du mariage… Les célibataires ne songent qu’à trouver l’âme sœur tout en prétendant savourer leur solitude. Quant aux couples, les longues soirées entre filles où l’on expose les difficultés avec sa moitié rivalisent avec ces messieurs qui fuient dans les jeux vidéos ou le travail (entre autres). Peu sont ceux et celles qui assument l’importance du couple, comme si y croire était une preuve de naïveté.

Les gens se rencontrent. Passé le premier rendez-vous, chacun reste dans une posture prudente, par peur de s’emballer trop vite. On reste indéfiniment en période d’essai et ça affadit tout. L’idée même d’engagement fait peur. Et pas seulement à la gent masculine. C’est comme si les femmes d’aujourd’hui craignaient de s’accommoder d’un mode de vie qui a « enfermé » leurs mères et leurs grands-mères. Les couples se forment malgré tout mais peinent à s’affranchir du règne de la peur, de l’appréhension. Peur de faire le mauvais choix, de devoir renoncer à leur liberté. Peur surtout d’un amour qui ne durerait pas. On cherche à souffrir le moins possible et on ne prend plus le risque nécessaire pour vivre de belles histoires.

Pourquoi le couple est-il devenu une affaire si compliquée ? Est-ce parce qu’on en attend trop ?

Je pense que oui. On en attend trop de l’autre et pas assez de soi-même. On se met en quête de la bonne personne pour soi, sans penser être la bonne personne pour l’autre. Mais l’amour se niche dans l’altérité, dans ce qui chez l’autre diffère complètement de nous et demeure mystérieux…

Et puis, notre époque ne nous donne pas l’occasion de consacrer le temps nécessaire au couple. La pression du travail par exemple, change le sens des priorités. Face à un avenir incertain, le court terme remporte la palme. On ne se projette plus et cette absence de vision commune prive le couple d’une ressource à mon sens, bien cruciale…

S’ajoute à cela le besoin d’intensité orchestré par une société de consommation et audiovisuelle qui n’aide pas à penser que l’inévitable routine n’est pas foncièrement un signe d’échec dans une vie à deux. Or les moments d’ennui sont précieux ! Sans eux, comment prendre considérablement conscience qu’il faut renouveler sa créativité ? Mais lorsqu’ils surviennent nous sommes plus tentés de fuir… Ou chercher à se divertir ailleurs.

Le couple est pour moi le lieu d’un bonheur à nul autre pareil… A condition de savoir à quoi s’en tenir. Partir quand les soucis arrivent, c’est ne pas se donner la chance de connaître l’amour, le vrai. Celui qui s’enrichit et se renforce au fil des années. Cet amour qui nous fait aimer l’autre pour ce qu’il est. Il nous donne le bonheur de vivre avec son meilleur ami, celui qui ne nous donne nul autre choix que d’être nous. Et alors seulement, on a ce sentiment d’être plus forts et plus libres à deux .

Seules les personnes qui ne connaissent pas cela ont le sentiment certain que le célibat est la meilleure des situations.

Forcément.

Jessica BEAUFORT