Découvrez un témoignage à la forme « originale », d’une sœur ayant été confrontée aux barrières du nationalisme dans sa démarche matrimoniale.

Salam walaykoum wa rahmatullahi wa barakatou !

Je vous propose mon témoignage sous une forme un peu originale sur le thème du mariage refusé par les parents à cause du nationalisme.
Ce témoignage est tiré de mon histoire, mais je suis une sœur, je parle donc à la place d’un homme que j’ai pu connaître et avec qui le mariage m’a été refusé.

« Aujourd’hui, j’ai 21 ans et je repense à toutes ces années que j’ai déjà vécues. Mon enfance, ma très tendre enfance, mon adolescence et les quelques années qui ont suivi. J’avais pourtant bien commencé, dommage, qu’on ait décidé de tirer sur mon destin pour me fusiller.

J’ai toujours grandi dans une famille aimante, 4 sœurs, 2 grandes, 2 petites. La base dans ma famille, c’est le soutien, l’amour. On est tous prêts à mourir l’un pour l’autre. Ma famille à moi, elle est plutôt traditionnelle, on a des règles, des valeurs, des principes. Impossible à transgresser, on grandit avec et croyez-moi avec du temps, on s’y fait.

J’ai une maman en or, elle m’a tellement appris ! Mon éducation c’est du béton, sur elle je n’aurais jamais osé hausser le ton. Le paradis se trouve sous les pieds des mères, et qui mieux qu’elle le mériterait ? Depuis mon premier souffle, elle est là à me soutenir, m’épauler. Ma mère, elle sait tout de moi, sans aucune parole, elle comprend tout. C’est mon bijou, ma perle précieuse, elle a fait de moi un Homme, je ferai d’elle une Reine…

Mon père, lui c’est le boss, il fait tout pour son foyer, on l’a élevé comme ça. Il aurait même été jusqu’à se casser le dos, pour voir notre sourire sur nos lèvres.. Il est distant, autoritaire et très conservateur, mais si vous saviez comme il a un grand cœur. C’est le genre de papa qui passe son temps entre le travail et le fauteuil du salon, entre son uniforme et sa djellaba.

J’ai grandi en France, mes parents au Maroc. Ils se sont connus là-bas, ils se sont mariés là-bas. Pour dire vrai, ils n’ont pas vraiment eu le choix, mariage arrangé, c’est vrai ! Pourtant, je n’ai jamais vu un autre couple autant rayonner. Ils s’aiment, ils ont appris à s’aimer et je sais aujourd’hui que mon père, pour rien au monde, ma mère ne voudrait s’en séparer. A l’ancienne, comme on dit, ils se sont mariés et sont venus vivre en France en pensant y trouver quelque chose de mieux, un petit bout de paradis.

J’ai grandi entre deux pays, la France et le Maroc. Entre deux cultures, française et berbère. Entre deux langues, français et chleuh. Entre deux mondes, le mien et le leur. Depuis petit, j’imagine mon avenir ici, une femme, des enfants, une petite famille. Comme tous les jeunes de mon âge, j’ai fait des conneries, on mettra ça sur le compte de la jeunesse.

Mes parents m’ont toujours appris à respecter les autres, d’où qu’ils viennent et quels qu’ils soient. Je pense au fond, qu’eux mêmes, ont dû souffrir de ce regard, ce regard de mépris face à l’inconnu. Quelques soient l’origine, la nationalité, la religion, la culture, ils m’ont toujours appris à être tolérant et ouvert.

Aux alentours de mes 17ans, j’ai rencontré une fille, non plutôt une fée. Elle a mis mon cœur à l’amende en quelques temps, elle a su m’ensorceler. Je vous parle de cette fée, ce n’était pas n’importe laquelle. Celle-ci, elle a réussi à me redonner des ailes. Elle est tombée dans ma vie, sans que je ne m’y attende, elle a ébloui mes nuits, et mon cœur, elle a réussi à le prendre.

On a vécu 3 années assez mouvementées, des rires, des larmes mais surtout d’amour. Oui, cette fée m’a tout apporté. J’aurais été prêt à me sacrifier pour elle, je ne lui souhaitais que du bien et elle de même. On ne pouvait pas rêver mieux comme relation, j’étais elle, elle était moi. L’un sans l’autre, on ne dormait pas.

Elle, elle est née ici comme moi, mais ses parents aussi. Elle n’est pas née dans une double culture, ni dans des traditions grotesques. Elle a eu une belle éducation et une famille aimante. A nous deux, on rassemblait à deux continents, on refaisait le monde. Elle m’apprenait des tas de choses et inversement. Elle voulait connaître mon deuxième pays, elle voyait que mes yeux brillaient dès que je parlais de lui.

J’avais trouvé la femme de mes rêves, la mère de mes enfants. On parlait mariage et vie à deux, et dès qu’on voyait un couple, on se projetait à travers eux. On partageait tout, du début à la fin. Puis vint un jour, où je dus en parler aux miens.

Ils m’avaient appris la tolérance, mais ce jour là ne l’ont pas appliquée. On m’a refusé sa main, car il était écrit « Française » sur sa carte d’identité, et « musulmane » ne suffisait pas. Mon monde s’est arrêté de tourner, j’ai perdu mon ange, ma félicité. J’étais pris entre deux clans, comme depuis mon premier cri. J’avais face à moi la France et derrière moi les traditions archaïques de mes parents.

J’aurais tout donné pour elle, c’est vrai, mais face aux larmes de ma mère, je n’ai pas pu résister. Je voulais être heureux, mais mes proches m’en ont empêché. Cela fait un an désormais que l’on vit séparés, et pourtant tous les jours, j’ai une pensée pour elle. Elle a souffert, croyez-moi, il fallait voir ses yeux. Ils me criaient : « Reviens, on est fait pour être à deux, tu ne peux pas me laisser comme ça, dis-moi que tu n’es pas sérieux ! ». Je n’ai pas su retenir mes larmes au moment de nos adieux. Mes parents, ce n’est pas compliqué, c’est la première fois que je leur en veux.

J’ai le cœur fusillé, je vis malgré tout, je n’ai pas eu le choix. Je ne sais pas comment elle va, ni ce qu’elle vit depuis que je ne suis plus là. J’ai touché son honneur, et sa dignité. C’est une battante, dès le début j’ai su qu’elle se relèverait.

Je pensais que l’amour était plus fort que tout, mais aujourd’hui, j’apprends à vivre sans elle, et ça me rend fou. Mes parents, je les aime, mais sur ce coup là, ils ont merdé. Tant pis si je suis malheureux plus tard, de toute façon, je sais que la femme de mes rêves je l’ai laissée filer.

Mon prénom à moi, c’est Hakim ».

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