Aujourd’hui, nous connaissons tous le keffieh comme symbole de la cause palestinienne. C’en est même un objet militant. C’est aussi devenu cet accessoire complètement dépolitisé qui a fait son entrée sur les défilés, en 2008 quand  Balenciaga l’a revisité, suivi  de près par d’autres maisons de haute-couture.  Il a envahi les dressings de tout un chacun, jusqu’à ceux des bobos. A Paris, les Indiens qui en fabriquent en coton se disputent le marché avec les Chinois qui le produisent moins cher, mais en synthétique. Et plus aucun, ou presque (voir au bas de l’article), n’est plus produit en Palestine. Mais d’où vient le keffieh, le vrai ?

A l’origine, le keffieh (kufiyyah en arabe) vient, comme son nom l’indique, de la ville de Koufa en Iraq. Haut lieu de savoir aux premiers temps de l’islam, ses motifs sont inspirés de la calligraphique de style koufique, originaire de la même ville. Il était porté traditionnellement par les bédouins du proche et moyen-orient, sous différentes formes, notamment pour se protéger du soleil et du sable. Si le noir et blanc est le symbole des Palestiniens, on trouve aussi le rouge et blanc, ou shemagh, porté par les Jordaniens, ou encore le totalement blanc, ou ghutra, porté dans le Golfe.

Il est traditionnellement maintenu sur le haut de la tête par un anneau que l’on appelle agal (ou ‘iqal). A la base, cet accessoire était le signe distinctif des populations bédouines, face à des citadins qui portaient plutôt un chapeau (tarbouche, chechia…). Il avait donc déjà une dimension politique. Au delà de cela, il faisait partie de la culture et avait un grand sens moral car on le portait vers dix-huit ans, comme un rituel d’entrée dans l’âge adulte. C’était donc aussi une marque de virilité, le signe de l’accession au monde des hommes.

keffieh-le-bonheur-est-dans-la-paix-2C’est dans les années 1960 que le  keffieh entre sur la scène international et dans l’imaginaire collectif avec le début de la résistance palestinienne et Yasser Arafat qui le porte comme un emblème. Ses couleurs changent en fonction du groupe actif : vert et blanc pour le Hamas, noir et blanc pour le Fatah et rouge et blanc pour le FPLP. Le porter devient signe de soutien à la cause palestinienne. Il est l’étendard de la Palestine, le drapeau indestructible. C’est pourquoi la colère gronde quand les jeunes israéliens s’en emparent comme accessoire de mode, ou quand les jeunes des quartiers de Beyrouth se l’approprient : les Palestiniens se sentent dépossédés de leur emblème. Quand Leila Khaled, activiste palestinienne de FPLP, le porte pour la première fois, son keffieh symbolise non seulement la résistance palestinienne, mais aussi l’émancipation des femmes. Celui qui était réservé aux hommes appartient désormais à tous les Palestiniens.

Il ne reste aujourd’hui plus qu’une seule fabrique palestinienne de keffiehs, à Hebron en Cis-Jordanie. Pour les soutenir, achetez vos keffiehs chez Soliv’r, qui contribue à la pérennité de cette fabrique grâce à sa démarche de commerce solidaire et équitable, dont voici notre sélection coup de coeur :